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La chambre d’échos,
in Botteghe oscure n°X,
1952

Référencé à l’origine sous le titre « Chambre d’échos » (en témoigne une lettre manuscrite de René Char à Alain Jouffroy, et l’anthologie de poèmes L’Ouverture de l’être publiée en 1995 aux éditions de la Différence), ce poème, pour une raison qui nous échappe, fut imprimé sous le titre « L’énonciation ». Il est le premier écrit d’Alain Jouffroy publié ailleurs que dans Néon, la revue parisienne qu’il co-animait avec ses amis et camarades du mouvement surréaliste. « Chambre d’échos » devenu « L’énonciation » fut donc retenu dans les pages de Botteghe oscure, publication cosmopolite de haute volée, fondée en 1948 à Rome par la mécène aristocrate Marguerite Caetani. Contre l’impératif de littérature engagée théorisé par Jean-Paul Sartre, alors au cœur des enjeux littéraires, Botteghe oscure soutenait la souveraineté de création du poète et son libre-arbitre en regard des luttes sociales et des militantismes politiques. Dans une Europe meurtrie par les furies nationalistes, Botteghe oscure avec ses sections linguistiques multiples apparaît rétrospectivement comme une incarnation exemplaire de l’idée de République universelle des Lettres. Présenté comme un « extrait de L’Ouverture de l’être à paraître, L’énonciation expose à la première personne du singulier les secousses du théâtre intérieur de son jeune auteur. Le poème possède un caractère assez singulier pour que Ms Caetani ait souhaité le faire voisiner avec d’autres écrits et poèmes en cinq langues, issus d’une communauté d’auteurs de vingt nationalités différentes parmi lesquels on trouvait Georges Bataille et René Char. C’est précisément ce dernier, responsable de la section française de Botteghe oscure qui recommanda à sa directrice les poèmes du jeune Alain Jouffroy à qui il déclarait dans une lettre en date du 12 juillet 1952 : « Vous êtes un des rares jeunes poètes de l’à-vif dont le langage soit dimension et vérité, et non artifice d’héritage. »