« Tout l’espace de la réalité est jalonné par les signes que la pensée d’un individu se fait à elle-même. Ils changent l’existence de chacun en roman. » Ce roman vécu autobiographique illustre à merveille cette conviction de l’auteur. Pièce maîtresse de l’œuvre écrite d’Alain Jouffroy, très remarqué lors de sa parution en 1978, Le roman vécu qui renouvelle l’expérience d’un genre égotique illustré par Stendhal, électrise la pensée, dénude les éléments constitutifs d’une vie d’homme : l’enfance, les rêves, les choix politiques, la lutte contre la jalousie et la culpabilité, mais encore l’amitié, l’art, les femmes désirées, aimées, perdues, retrouvées qui sont les plages heureuses de la vie d’un homme. Les femmes jouent dans ces pages un rôle déterminant, comme les changements de la pensée, les jeux répétitifs de l’inconscient et la chance, pour former un véritable opéra du bonheur. Avec la plus grande sincérité de ton, le poète ennemi déclaré de toutes les fatalités, offre au lecteur les aspects intimes d’une vie de dandy mue par un impénitent désir de mobilité et de liberté libre : « J’écris selon un ordre discontinu, impromptu, celui du désir et de la soif de m’ouvrir, de découvrir, d’oser, de jouir de ce que je ne connais pas, de ce que je ne sais pas… J’écris comme on s’oublie, j’écris comme on rêve et comme on fait l’amour… ». On vous lira et relira dans un siècle, déclarait publiquement André Parinaud à Alain Jouffroy par l’intermédiaire d’un article paru dans Lettres Arts d’octobre 1978, poursuivant : « J’ai dû faire un effort réel pour m’arracher à la fascination… Si la grande littérature est d’abord une preuve d’être, alors vous l’avez donnée : la qualité de ce roman-vécu, justifie les absinthes de Verlaine et les saloperies de Rimbaud. » Dans Le monde du 29 septembre 1978, Claude Mauriac, pourtant guère familier de l’univers de Jouffroy confesse : « Le roman comme l’amour est à réinventer. Alain Jouffroy les réinvente l’un et l’autre. Alléluia à la vie, crie de joie au milieu des orages, l’orgueil de ne ressembler à personne, des pages, des chapitres superbes, un beau et grand livre, oui, que j’ai lu avec passion, en attendant et en recevant parfois des illuminations. »






